Le jour où j'ai souri

Le jour où j’ai souri

Le saviez-vous ? Sourire rend heureux. Et rend les autres heureux. C’est le professeur Michel Lejoyeux himself qui le dit. Avec un nom pareil, impossible de le contredire ce cher monsieur. Puisque l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, j’ai décidé de faire le test grandeur nature pendant une journée. A Paris, je précise, sinon ça n’aurait pas été drôle.

Paris, ville lumière, ses bâtiments somptueux, ses ponts pour les amoureux, ses boulevards où déambuler, ses… Parisiens. Je dirais même plus : ses conducteurs parisiens. A la lecture de ces trois mots, une ribambelle de clichés peu réjouissants sont en principe en train d’affluer à votre esprit soudainement en alerte.
Comment ne pas se sentir agressé lorsque l’on évolue tous les jours en deux roues dans le flot discontinu de véhicules en tous genres qui envahit la capitale ? De nature joyeuse et pacifique, et ayant été pourvue dans ma jeunesse d’une excellente éducation – merci mes parents chéris, je m’efforce de rester calme et civique en toute occasion et cela fonctionne ma foi plutôt bien.

Le feu passe au vert et la voiture devant ne démarre pas ? Un léger coup de klaxon joyeux pour prévenir. Un taxi déboîte soudainement sans regarder ? Double bip bip amical pour signaler ma présence. Une camionnette grille la priorité à droite ? Bouh pas bien, gros tûuuut énervé parfois doublé, je l’avoue, d’un petit juron sous le casque.
Et voilà, c’est là que ça se corse. Impossible de ne pas réagir lorsque notre vie est menacée, d’autant plus quand elle l’est à cause d’une infraction majeure au code de la route ou suite à une incivilité notoire.

En fonction de l’individu qui se trouve en face de vous, c’est alors quitte ou double. Soit le type – eh oui messieurs, c’est la minute féministe, car bien souvent, plus vous êtes en tort, plus vous êtes de mauvaise foi et plus vous semblez prendre un malin plaisir à vous défouler sur la frêle demoiselle casquée qui vous a sermonné, pas vrai ? Alors que les dames au volant font, certes, de temps en temps des fautes d’étourderie mais sont toujours désolées d’avoir failli vous mettre par terre…
Bref, reprenons : soit le type signifie d’un rapide mouvement de la main qu’il reconnaît sa faute et chacun repart serein vers son destin, soit c’est Hulk qui se réveille et là, nul ne peut prédire l’escalade de violence qui pourrait potentiellement s’ensuivre si nous avions le malheur de ne pas nous laisser faire.

Souvenez-vous, en octobre dernier. Un chauffard en mp3 me pousse au feu rouge et me crache dessus au passage car je n’ai pas pu me décaler pour le laisser passer et j’ai en plus osé lui répondre – poliment je tiens à le préciser. Comment réagir face à ce type de comportements si agressif et violent qui nous rendent tellement nerveux, ce qui s’avère être très mauvais pour la santé ?

Pour reprendre les mots du professeur Lejoyeux : « Notre thermostat biologique est contrôlé par notre psyché. Lorsque nous sommes en situation de stress, nous sécrétons une hormone, la noradrénaline, qui prépare notre corps à se défendre ou à fuir. Nos battements de cœur et notre respiration s’accélèrent, notre taux de sucre dans le sang augmente. Si nous vivons fréquemment en état de stress aigu, cela devient néfaste. Si cela se prolonge, les hormones corticoïdes, elles aussi toxiques, prennent le relais. À l’inverse, la bonne humeur fait baisser la tension ainsi que la glycémie et permet une plus grande résistance aux infections. » Que demande le peuple ?

Le professeur est formel : souriez ! Hum, pas évident, un peu comme tendre l’autre joue quand vous venez de vous faire gifler n’est-ce pas. Et pourtant, ça marche. Un sourire désamorce immédiatement le plus virulent des tempéraments et génère de façon quasi instantanée un climat bienveillant et apaisant. Chez « l’adversaire » et chez vous, c’est tout bénèf.

Exemple à la clé : ce fameux jour où j’ai souri (vous connaissez la blague du motard heureux ? Les moucherons dans les dents, ce fut pour moi ce jeudi-là), suis sortie un peu vivement du parking du bureau au moment où un scooter arrivait trop rapidement de la droite. Cela n’a pas loupé, le gars a klaxonné, pas du tout amicalement (c’est fou comme on arrive parfois à mettre une intonation sur un simple son). Mais voilà, quand il a vu la mine réjouie sous le casque, son visage n’a pas pu faire autrement que de s’illuminer et de signifier implicitement que mon empressement – qui lui avait sans doute fait peur, était pardonné.

Conclusion : le gros avantage de cette stratégie de la bonne humeur, c’est qu’elle vous permettra de faire sur la route toutes les bêtises et étourderies du monde sans vous faire engueuler !

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Cet article est paru dans le Génération Moto #109.

Photo : Guillaume B.
Blouson : Lady Jones de Segura